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L’évolution des bibliothèques : entre tradition et innovation

Il y a 30 ans, les bibliothèques territoriales se sont beaucoup interrogées sur le développement de la lecture, la relation au public, l’investissement dans de nouveaux projets en direction des jeunes publics, dans les milieux ruraux… Elles ont mené en parallèle des actions offensives, par exemple dans la lutte contre l’illettrisme ou plus largement dans la lutte contre les exclusions ; mais elles ont aussi mené de vastes programmes de construction dont l’existence même se justifiait surtout par cette relation de proximité au public.

Des usages en mutation : quelles conséquences pour les collections ?

Avec l’avènement d’internet et de l’informatique, puis le déploiement de l’internet mobile, les ressources numériques se font jour, et avec elle la modification des usages des publics et leur nécessaire accompagnement.

Cette bascule des usages entraîne une rupture qui intervient au terme d’une vingtaine d’années d’évolutions techniques.

Le développement numérique a considérablement bouleversé nos consommations culturelles, et impacté les bibliothèques, tout comme d’autres domaines. Les craintes de désertion des bibliothèques se sont finalement révélées injustifiées ou démesurées et ce, notamment, face à leur capacité d’adaptation et de réactivité.

L’accès à l’information s’est diversifié et facilité ; les usages évoluent, impactant le volume des prêts, mais attestant dans le même temps d’une demande de fréquentation de bibliothèques ; signe que les points de repère traditionnels, notamment construits autour de l’usage des collections, sont bousculés.

La relation à la bibliothèque et à sa collection se modifie, à l’image de l’évolution du lien qu’entretient la société à l’égard de l’imprimé. On peut puiser dans notre quotidien de nombreux exemples de l’évolution du lien avec l’imprimé : tel collégien qui construit son exposé autour de ce qu’il va glaner sur internet plutôt que d’aller au CDI de son collège, monsieur Untel qui consulte Google News plutôt que le quotidien de sa bibliothèque, tel lycéen qui préfère la synthèse trouvée sur Wikipedia à la consultation des sources.

La bibliothèque est l’objet de concurrences multiples au travers de deux de ses missions fondamentales : l’accès au savoir et la démocratisation de cet accès. Il en découle des interrogations légitimes sur l’évolution de nos établissements, et la représentation des métiers.

Une enquête du Ministère de la Culture, sur les usages des bibliothèques, révèle une augmentation de 23% du nombre d’usagers en 10 ans, dont 14% des jeunes de 15 à 24 ans. Le numérique n’a donc pas nui à la fréquentation des bibliothèques.

Si le livre traditionnel occupe toujours une place privilégiée dans les bibliothèques (« 84% des usagers lisent des livres sur place et/ou en empruntent »), 43% du public pratiquent une activité en lien avec l’outil informatique, l’offre numérique et autres services de la bibliothèque.

Ainsi il en découle cependant quelques certitudes, qui renforcent l’idée que les bibliothèques ont un avenir certain :

  • les bibliothèques continuent à attirer du public ;
  • le lieu bibliothèque répond par conséquent à une attente ;
  • cette attente n’est plus centrée uniquement sur l’usage des collections.

L’usager au cœur des préoccupations : des attentes nouvelles, des services adaptés

C’est autour des attentes du public qu’il y a une identité du lieu à recréer, au-delà de la présence physique de la collection, tout en gardant à l’esprit qu’une bibliothèque est la seule à réunir toutes les conditions d’émergence du savoir.

Le bibliothécaire a :

  • La connaissance des publics « La connaissance des lecteurs n’est pas moins nécessaire que celle des livres. C’est dans la correspondance de ces deux savoirs que repose le métier de bibliothécaire ». Il s’agit bien d’avoir une connaissance fine et précise du public, de ses attentes, de ses besoins et de ses réactions.
  • La connaissance des enjeux documentaires. C’est d’ailleurs une des raisons qui font que la gestion des bibliothèques est aujourd’hui plus complexe qu’il y a vingt ans. Ces enjeux, aujourd’hui d’ampleur mondiale, viennent considérablement modifier le fonctionnement des bibliothèques : conséquences de la généralisation des collections numériques, gestion des données de larecherche, etc.
  • La mission patrimoniale. La bibliothèque, plus que jamais, est là pour permettre la sédimentation qui conduit à la constitution du patrimoine à venir ; plus que jamais, parce que l’évolution des techniques (abondance de la forme numérique de la documentation) tendrait à faire croire, faussement, que les bibliothèques n’ont plus d’autre rôle que de s’inscrire exclusivement dans cette « gestion du flux ». Non, les bibliothèques, plus que jamais, ont aussi à maintenir leur rôle de lieu de conservation et de diffusion de connaissances.

 

La bibliothèque, un lieu de vie et de partage : au-delà du livre

Les vingt dernières années ont mis à mal le lien facile entre les collections et leur public. Cette question en tout cas est essentielle parce que l’existence de la collection est liée à l’identité même de la bibliothèque.

Aujourd’hui plus que jamais, l’avenir des bibliothécaires se situe dans la médiation. La collection ne vaut que parce que c’est l’usager qui en est le cœur. La rupture de ces dix dernières années a mis en avant le rôle de l’usager autant que celui du bibliothécaire dans la question du choix. L’essentiel est de continuer à faire en sorte que la bibliothèque réunisse toujours les conditions d’émergence du savoir. Car le bibliothécaire n’a jamais fait, depuis la nuit des temps, autre chose que de créer des horizons d’attente.

Globalement, l’image de la bibliothèque, lieu où l’on ne fait qu’emprunter des livres ou étudier, n’est donc plus d’actualité. La bibliothèque du XXIème siècle essaie de répondre aux demandes des différents groupes de personnes. Elle est bien en phase avec le territoire sur lequel elle est implantée. Dans une bibliothèque, on ne fait plus guère de conférences, mais plutôt des ateliers, de natures très diverses. Cela peut aller de l’atelier multimédia à l’atelier couture. Et, parfois, ce sont même les usagers qui les animent. On y fait aussi des rencontres d’auteurs, de réalisateurs, et d’artistes, pour échanger. Alors la bibliothèque devient un lieu de vie, où chaque individu peut se réaliser… quitte à sortir du champ culturel.

 

Atelier à la Médiathèque des Gaves avec l’artiste Sara Branger

 

 

2 Commentaires

  • J’ai beaucoup voyagé dans ma vie. J’ai vécu dans de nombreux endroits en France. Grandes villes. Petits villages. Partout j’ai cherché la bibliothèque ou la médiathèque la plus proche. Pour moi c’est un lieu culturel primordial. Il est le lien indispensable pour rester un minimum connecté au monde qui pense et transforme cette pensée en écrits.

    • Philippe,

      Un grand merci pour votre retour, que nous partageons avec conviction ! N’hésitez pas à nous rendre visite, que ce soit sur le réseau de lecture Publique ou par le biais de notre webmagazine culturel ! Vous souhaitant une très bonne journée 😉

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