Sent Pençard, le Roi de Carnaval : de la Gloire aux Flammes !

La purification par le feu est l’ultime étape qui scelle le tragique destin de Sent Pançard, l’emblématique monsieur Carnaval béarnais.

Le Carnaval Biarnés existe depuis plus de 35 ans. Cette fête populaire annuelle qui se déroule dans plusieurs villes béarnaises et dont les festivités s’étalent sur plusieurs jours, est basée sur des allégories, des métaphores, des personnifications… des thèmes communs adaptés aux singularités et typicités des lieux, des localités tout en respectant la tradition , la survivance philosophique du renouveau liée au printemps. Son panthéon se décline autour du roi Sent Pançard (Carnaval), de son épouse Carronha, de Quarèsma (Carême), des ours, des hommes et des femmes sauvages, des Blancs, des gendarmes… Son cérémonial retrace la chasse à l’ours, l’entrée de Carnaval dans la ville, la remise des clefs, la fête et la fourberie, le procès et la crémation.

Durant la nueit de l’Ors (la nuit de l’ours), les ours sortent de leur tuta (tanière) au moment de la montée de la sève et rencontrent des jeunes filles délurées, les Rosetas… Cet épisode renvoie à l’interchangeabilité entre l’ours et l’Homme sauvage, à son caractère hybride : avec sa posture érigée et ses appendices quasi humaines,  l’ours , selon la légende, peut enfanter la femme… Des Caçadors (chasseurs) s’interposent alors.  Puis, au final, les Orsatèrs (montreurs d’ours) dépouillent les ours de leur sauvagerie et les font danser.

Carronha, qui ne peut plus rester dans l’ombre de son fourbe de mari, choisit d’entrer dans la lumière. En l’espace d’une nuit, elle abandonne son costume de tristesse et de rancœur pour devenir LA HEMNA (la femme), la reine d’un peuple. Deux camps s’affrontent, séparés par une Sèga (barricade) : d’un côté, les Beròis ou la société de l’ordre et des notables et de l’autre, les Lèds ou la société du désordre et du sauvage.  Le passage ou le renversement de la barricade symbolise le passage du pouvoir institutionnel au pouvoir de la rue, de la monotonie de l’hiver à la fantaisie du printemps…

Le Maire remet las claus (les clefs) de la ville à Sent Pançard qui devient dès lors le maître d’une canaille exhortée à mettre la pagaille. Il prend ainsi possession des rues suivi de sa cour et d’un imposant cortège de partisans, la Pantalonada, qui le fait courir. Ce défilé est une déferlante de musique, de couleurs, de masques. Sent Pançard est porté en triomphe par la foule qui scande « Carnaval qu’ei arribat ! » (Carnaval est arrivé ! ).

Puis, face à une justice corrompue, le roi Sent Pançard devient bouc émissaire, responsable de tous les malheurs, tensions et conflits de l’année écoulée. Quarèsma (Carême) traîne dans les couloirs du tribunal, attendant son heure. Condamné au bûcher, le roi déchu est brûlé sur la place publique au son d’Adiu praube Carnaval (Adieu Pauvre Carnaval). « Tu t’en vas e jo demori (tu t’en vas et moi je reste) / Tornaràs entà aute an (tu reviendras l’année prochaine) ».