Il existe des genres qui s’entremêlent sans que l’on s’en aperçoive. Heureusement, Fabien veille pour nous et nous décrypte aujourd’hui un phénomène pourtant de plus en plus évident …
Les littératures de l’imaginaire, qui regroupent la Science-fiction, la Fantasy et le Fantastique (SFFF) sont considérées depuis toujours comme un genre marginal, peu respectable et peu fréquentable de la littérature dite générale (=> Blanche ). Il y a même consensus entre les critiques littéraires et les grands lecteurs !
A croire que Pierre Bordage volait leur goûter à la récré quand ils avaient 4 ans ! (Spoiler alert : Pour les deux du fonds qui ne suivent pas, Pierre Bordage est un grand écrivain français de SFFF)
La SFFF, un genre sous-côté ?
Pour beaucoup, La SFFF équivaut à une écriture pauvre, un récit basique, manichéen et qui traite perpétuellement des mêmes thématiques : affrontements bourrins dans l’espace à l’aide de gros vaisseaux, ou invasion de la terre par des aliens pas très choupis qui veulent éradiquer la race humaine, ou un monde médiéval dans lequel un jeune écuyer se révèle être le dépositaire d’un pouvoir légendaire qui lui permettra de sauver le monde des griffes d’un mage noir très très méchant !
Et… ils n’ont pas tout à fait tort. Pas tout à fait, car il y a bien sûr des romans de SFFF qui répondent à ces caractéristiques (aucun jugement de valeur de ma part, les goûts, les couleurs, tout ça et de toute façon j’aime bien les vaisseaux spatiaux).
Pour autant, les genres et sous-genres de la SFFF étant nombreux, il y a une production éditoriale très riche dans le domaine susceptible de plaire à chacun selon ses goûts.
Des infiltrés en catimini …
Mais revenons à nos moutons (électriques ?) au sujet de l’invasion subreptice de la littérature blanche par la SFFF. Si on regarde la production littéraire blanche, on remarque que depuis quelques années, de plus en plus de titres pourraient être qualifiés de romans de Science fiction.
De par les thématiques abordées, voire le cadre spatio-temporel, ils se rapprocheraient davantage de romans dits d’anticipation, ou fantastiques (courants importants de la Science-fiction) que de romans classiques.
C’est le cas par exemple du livre l’anomalie d’Hervé Le Tellier, prix Goncourt de l’année 2020. Pur roman de science-fiction qui c’est pourtant très bien vendu puisqu’il est le deuxième prix Goncourt le prix vendu depuis la création dudit prix.
Ce roman s’est-il érigé en porte-étendard de la SFFF et a permis sa démocratisation auprès du grand public ? Que nenni, on retrouve la classique couverture blanche des livres Gallimard (on est loin des couvertures des livres de SFFF qui caractérisent son contenu : déclinaisons de vaisseaux spatiaux (encore eux !) pour les space-opéra, des machines à vapeur pour le steampunk (voir exemple au dessous) et surtout une quatrième de couverture qui évite soigneusement d’utiliser un jargon qui pourrait rappeler qu’on a affaire à un livre de Science-fiction : « Roman virtuose où la logique rencontre le magique »… comme si Gallimard n’assumait pas de publier de la SF, comme s’il avait peur d’effrayer ses lecteurs classiques^^.
Ce n’est pas le seul, voici d’autres exemples de livres de littérature blanche qui flirtent avec la SF : Transparence de Marc Dugain / Globalia de Jean-Christophe Ruffin / Notre part de nuit de Mariana Enriquez (gros coup de cœur !). / Dans la forêt de Jean Hegland / Les enfants sont rois de Delphine de Vigan. Il y a même des romans policiers qui s’acoquinent avec la Science-fiction comme L’épidémie d’Asa Ericsdotter par exemple.
Mais du coup, Fabien, c’est bien ou pas ?
C’est une bonne chose que de plus en plus d’auteurs de littérature blanche utilisent la science-fiction dans leurs écrits, afin d’imaginer des futurs plus ou moins proches plausibles. C’est même une très bonne chose car étant moins confidentielles que la SFFF, la littérature blanche est à même de toucher plus de monde et ainsi interpeller les lecteurs sur d’éventuelles dérives possibles. Ils sont également une bonne porte d’entrée initiatique au riche univers de la SFFF.
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